Cent quatre vingt dix sept.
Les destinations qui appellent et murmurent des promesses d’inconnus.
Lui bloqué sur son île au creux du sable.
Et les avions qui sillonnent le ciel par dessus les bateaux qui naviguent les sept mers.

Entre les murs un peu abimés de la demeure entre en collision une multitude d’univers.
Dans les rires du père se chantent les nuits étoilées de Busan.
Sous les jupes de sa mère susurrent les vagues de Perth.
Alors il trace du bout des doigts entre les constellations un voyage éphémère.

Sur l’épaule la sangle douloureuse du sac de voyage.
Aux pieds les chaussures usées après chaque pas.
Et sur la langue les mots qui se confondent et s’embrouillent.
Toujours les souvenirs qui s’empilent dans la mémoire et se déversent comme un raz de marée.

Ashton explorateur. Découvreur du monde. Indiana Jones moderne.
Et pourtant toujours Adélaïde.
Comme une rengaine obstinée.
Port d’attache sur lequel le ramène chaque vague.

Europe, Asie, Amérique.
Il a vu le monde et oublié la saveur du pays.
Les regrets qui rongent et la cage sans barreau.
Juste son île du bout du monde.

Les années à regarder les bateaux quitter le port vers l’infini du globe.
Et les mains vides de billets ou passeport.
Juste un enfant affamé d’aventures.
Et dans le sang l’appel du large qui hurle à s’en déchirer les atomes.

Jusqu’au premier voyage.
À la déclaration d’amour.
Aux lettres échangées avec les étoiles.
À l’aventure sans fouet ni chapeau.

Juste une disparition.
Le décès qui les ramène si loin à Geoju.
Et dans les larmes du père il inspire le monde pour la première fois.
Poussière d’univers dans les poumons.

Et le coup de foudre.
Pour quatre murs abandonnés qui lui sont légués.
Le vieux café qu’il se met à aimer plus que les destinations.
Cent quatre vingt dix sept pays.

Et il en invente un dernier à l’odeur de café.
Aux murs les merveilles et les cauchemars.
Sur les étagères les livres qui dévorent l’espace.
Et derrière le bar Ashton qui ne cesse de sourire.